Bel est Belin


Il a la voix boiseuse, et l'on compte peu de crooners en France qui cachent dans leurs cordes un tel instrument. La texture de ses textes, comme des bélinogrammes rédigés dans l'urgence, lui donne les traits d'un chaman qui chante. «La nuit envahit tout / Paroles / Poumons / Pays». Je répète: «La nuit envahit tout / Paroles / Poumons / Pays» (Pauvre grue). Mais un rai d'espérance fuse de ses climats inquiétants, quoique sensuels et fertiles en rêveries. Des étoiles nouvelles. Le quatrième volet de sa quête discographique approchera-t-il Bertrand Belin du graal? «Je vais te trouver / C'est certain / Tu ne peux pas être / Bien loin» (Un déluge). Si cette douzaine de chansons lentes et dansantes parfois inverse ce qui est ténèbres en clarté, le poète, lui, donne l'air du gars qui fait la planche à l'ombre douce d'un bosquet. «On nage tranquille / Loin des soucis / Par un bel après-midi...» (Peggy). En zoomant le chasseur d'images distinguera d'autres baigneurs méditatifs; leurs profils évoquent Dominique A, Dick Annegarn, Jean-Louis Murat, JPNataf... Doux Jésus, quel est donc ce bivouac? Derrière le point d'eau, une plaine aride.

Baptiste Vignol