Femme de goût


Pourquoi ne pas le dire? Nolwenn Leroy est l’une de nos dernières grandes interprètes populaires. Il se niche quelque chose d’authentique dans sa voix, d’indiscutable, d'apaisant, sans quoi Alain Souchon, Laurent Voulzy, Christophe Miossec ou Jean-Louis Murat ne lui auraient pas écrit de chansons. Avec FOLK, la chanteuse se démarque en reprenant So far away de Nicolas Peyrac, Je ne peux plus dire je t’aime de Jacques Higelin ou Virages d’Yves Duteil! Si l'on ne retrouve pas toujours l’émotion intrinsèque de ces chefs-d'œuvre – Nolwenn chante presque trop bien pour exprimer leurs fêlures –, le track listing, de haute volée, nous entraine loin des tapis roulants sur lesquels s’assoupissent trop souvent ce genre d’albums-hommage. Car Nolwenn Leroy «dépoussière» également Hollywood de David McNeil (incroyable quand on y pense que cette merveille n’ait jamais été reprise auparavant), Jolie Louise de Daniel Lanois, La Rua Madureira de Nino Ferrer, du Malicorne, du Caradec, du Detressan – ses racines bretonnes sûrement – et propose un peu de Cabrel (Je t’aimais, je t’aime, je t’aimerai) pour le plaisir. Ne manquerait donc, s'il fallait pinailler, qu'un air de Murat, le plus sexy de nos folk singers ; Le monde caressant par exemple, sur lequel, à la brune, Nolwenn se serait promenée...

Baptiste Vignol


L'estime et le succès


« C’est quand je n’ai plus attendu le succès qu’il a commencé à venir » raconte le pianiste Albin de la Simone, 48 ans, à la journaliste Valérie Lehoux qui vient de lui consacrer un portrait dans Télérama. De quel succès parle-t-il? Du fait d’obtenir ce qu’il a cherché, sans doute, et de s’en montrer satisfait. Une nomination aux Victoires de la Musique pour son dernier album. Une jolie tournée de cent dates dans de petites salles chaleureuses. Car pour ce qui concernerait le fait d’avoir gagné la popularité, d’être connu du public, il faudra, Valérie, hélas, repasser. Provoquant à notre connaissance nulle émeute lorsqu’il se promène dans la rue, Albin de la Simone demeure un chanteur confidentiel, sans disque d’or ni mini-tube, qui reste donc, c'est sûrement regrettable, à la porte du succès. « Ma vie, mon œuvre » s'enthousiasme-t-il pourtant sur sa page facebook pour annoncer cet article à sa gloire. Le lecteur apprendra que La Simone n’est pas qu’un excellent musicien de studio auquel Alain Souchon, Jean-Louis Aubert et Vanessa Paradis ont fait appel depuis des lustres, mais qu'il chante aussi, même si la quasi totalité des Français l’ignore encore, et dessine également des croquis qu'il vend sur son site, 150 euros la pièce. S'il explique par surcroit être «artiste associé au Théâtre national de Bretagne», c'est chic, il ne semble pas mécontent d'intervenir en tant que « conseil artistique » auprès de Sophie Calle ! Carrément. Un créateur protéiforme donc. Qui mériterait sans doute davantage de reconnaissance. Sinon, la marque du succès, c’est souvent l’humilité.

Baptiste Vignol