Congeler la glace

Les masterclass de Juliette Armanet… Qui s’autocite sans vergogne, parle de ses chansons comme le ferait un critique admiratif, à coups de références pointues et de satisfecit non feints. « “Le dernier jour du disco” est du disco sauvage, ténébreux, presque rock. Les basses vrombissent, l’orchestration est fiévreuse. Le couplet est drama et le refrain solaire. “Sauvez ma vie” est un italo disco. “Qu’importe” est du disco palace 1975. Une chanson glam sans basse électrique, ronde et groovy avec des cordes scintillantes. C’est mon “I Will Survive” à moi. […] Comme les Daft Punk l’ont fait en 2013 avec RANDOM ACCESS MEMORIES où figure le tube “Get Lucky”, j’ai cherché à faire avancer le disco dans sa sonorité. » (Le Figaro, 12/11/2021) Woaw ! L'humilité faite femme. Autant d'aise foudroie l'éclair. D'ailleurs, que dire du truisme qui nomme son deuxième album, BRÛLER LE FEU? Des aigus crispants qui carient ses compositions? Du maniérisme qui fige l'interprétation? La chanson, c'est d'abord une question de sincérité. Barbara (que Juliette Armanet dit adorer) bouleversait. Véronique Sanson (dont elle se réclame)  inventait. France Gall (à qui ces chansons-là font penser) séduisait, sans se prendre pour Ella. Aujourd'hui, Angèle fascine, Clara Lucciani aimante et Chris(tine & the Queens) en impose. Juliette Armanet, elle, donne l’air de chanter comme elle aurait voulu s'entendre naturellement le faire; mais elle en fait des tonnes... Conclusion, BRÛLER LE FEU (outre l'enjôleuse Imaginer l'amour) est un disque passe-partout, appliqué, mimétique et vintage. Sans Aigle noir à l’horizon.

Baptiste Vignol