Match retour


Benjamin Locoge... Le gras des mots, l'élégance du marteau. Pour parler (en bien d'ailleurs) du dernier Jeanne Cherhal, le musicologue de Paris-Match écrit pour commencer: «C'est un album (un peu) passé inaperçu à sa sortie en mars.» Ah bon? En rotation sur France Inter, RTL et Europe 1 avec son premier single L'Échappé, on a pu découvrir Jeanne Cherhal chez Laurent Ruquier, Frédéric Taddéi, Anne-Sophie Lapix, Pascale Clarke, au 13 heures de France 2, lire des articles élogieux dans Télérama (deux pleines pages!), L'Express, Libé, Le Monde, Les Inrockuptibles… On fait pire comme promo. En tournée depuis mars, les salles où elle chante sont pleines, et «son» Bataclan du 3 juin déjà complet. Il faut sortir, Benjamin, ne jamais cesser d'être curieux, ni se contenter de regarder The Voice ou de feuilleter les pages culturelles du Parisien étanches, elles aussi, aux jeunes artistes audacieux de la chanson française. «On l'a connue mal dans sa peau à ses débuts» continue Benjamin Locoge qui semble si mal la connaître, cette chanteuse qu'un surpoids de complexes aurait empêché de publier sur la Toile ces quelques saillies impertinentes : Si tu reviens, j'annule tout, Colonel j'ai 16 ans, Tant qu'il y aura des Pussy... Mais poursuivons la critique de Match: «Pour son précédent effort ["Effort", le mot préféré des mauvais journalistes qui cherchent un synonyme à disque ou album… Quand ils ont employé les trois, ils se tournent alors généralement vers "opus"…], Jeanne s'était muée en rockeuse, faisant sa petite crise d'adolescence en public...» Ben voyons, à 32 ans, l'âge qu'elle avait quand sortit CHARADE en 2010. Les «rockeuses» seraient donc toutes de risibles adolescentes attardées? Propos de machiste qu'il faudra répéter à Catherine Ringer, Diane Dufresne ou La Grande Sophie. Vient alors le point essentiel, qui turlupine ce grand professionnel de l'interview qu'est Benjamin Locoge: «Serait-elle prête à tout envoyer balader par amour?». «La» question stupide dans toute sa splendeur, celle qu'ivre mort, un journaliste digne de ce nom aurait encore la décence de ne pas poser. Mais ça n'est pas tout! Après avoir souligné combien Jeanne Cherhal s'inscrit dans la lignée des chanteuses que la cause des femmes sensibilise, Benjamin Locoge regrette qu'elle refuse de lui confier ce qu'elle pense des amours du Président de la République… «Féministe certes, mais pas jusqu'au bout des ongles…» Combien Locoge est-il payé pour torcher de tels billets?

Baptiste Vignol