Rien qu'une chanteuse populaire


Elle a de la voix, Geneviève. Et chante sans calcul ni cérémonie. Pas comme les souris de The Voice à qui l'on demande de chanter fort parce que ça impressionne le public, même si les pauvres ne comprennent pas souvent ce qu'elles clament... Geneviève Morissette, elle, y va tout de go, avec finesse mais sans détour ni trémolos, ce qui donne à son chant une verdeur extrêmement plaisante. Tant et si bien que ses premiers fans la surnommeraient «La Morissette» paraît-il, comme l'on appelle les excentriques depuis La Goulue: la Piaf, la Gréco... Son premier album vient de sortir et porte un titre à la Dufresne : ME V'LÀ. C'est pas peu dire. Ce qui fait son charme surtout, ce sont trois ou quatre vraies chansons (Me v'là, La femme en beige, Tombé su l'cœur, Ça veut pu) dont la force d'émotion se niche dans leur caractère foncièrement populaire. C'est un personnage, Geneviève, alors elle chante des chansons théâtrales, tendues, sauvages, crues, mal élevées, étouffantes, drôles et désespérées que les autres ne chanteraient pas. On le sait, depuis quelques années, c'est au Québec que «ça» se passe question Chanson, poussé par Montréal, cette colline merveilleuse d'Amérique, attirante et punchy, dont on entend d'ailleurs souvent sonner le nom magique dans les «tounes» aussi de la relève québécoise (Ariane Moffatt, Mara Tremblay, Les sœurs Boulay, Peter Peter…). Il est donc assez curieux qu'aucune «pièce» sur ME V'LÀ ne l'évoque, ce nid royal. Même si Paris (Pour moi la France) fut en réalité la source des fantasmes de la chanteuse aux cheveux (trop?) rouge née au Saguenay Lac-Saint-Jean, sur la rive nord du Saint-Laurent. À tel point que ce disque a d'abord éclos le 28 août 2015 de ce côté-ci de l'Atlantique. Un p'tit rien qui en dit beaucoup.

Baptiste Vignol