La peinture d'Archimède


Pour les quadras qui au début des années 80 brûlaient leurs économies dans les vignettes Panini, Laval évoquera vaguement les «Tangos» du SL, avec Jean-Pierre Tempet dans les buts... Sinon, rien de bien net n'émane d'une cité où naquit le Douanier Rousseau. Pourtant, depuis 2008, deux frangins mayennais, les Boisnard, à la tête d'Archimède, s'illustrent avec tempérament. Donneront-ils à leur ville ses lettres de noblesse? Frédéric, l'ainé, compose des musiques électriques qu'on dirait venues d'Angleterre, carrées, aériennes, tandis que Nicolas, le chanteur, qui co-signe certaines mélodies, y colle des textes quatre étoiles, figuratifs, teigneux, drôles et dotés d'un Ton. Par surcroit, Archimède est un groupe de scène, vif et nerveux, sans jouer les rebelles. ARCADIE, son troisième album, est sorti juste avant l'été. Un mauvais disque n'avance pas. Non seulement celui-ci démarre fort, mais il va crescendo et foisonne d'idées, de «singles». L'espiègle Ça fly away par exemple, spéciale dédicace aux jeunes pousses parisiennes prétendument anglophiles, et qui rappelle avec panache la fibre rénaldienne du 33 tours MARCHE À L'OMBRE; ou Toi qui peines au bureau, genre de sagacité qu'aimerait tant écrire Bénabar… Avec une tranquillité savoureuse, Archimède déroule des tableaux auxquels il est douteux de résister (Au Marché des Amandiers, Oh viens ma chérie), élevant encore le niveau pour s'achever sur un bijou d'émotion dont le cadre est l'hôpital Necker: Le Grand jour. Que de nostalgies, d'influences dans la Variété! Benjamin Biolay a beaucoup écouté Serge Gainsbourg, Étienne Daho Françoise Hardy, Delerm Frida Boccara... Les Boisnard, eux, se sont shooté à l'Oasis (comme d'autres à la poésie parnassienne), et ça donne des chansons papillonnantes dont les ailes en fleurs, teintées d'azur et d'écarlate, se posent par instants sur les ouïes délicates en y laissant de leurs couleurs.

Baptiste Vignol