Péché mortel


« Comme l’encre / Une fois fixée / Ce qu’on fait ne s’efface pas… » Pourra-t-on écrire sans se faire insulter ni mériter la curée que Dominique A l'intouchable chante comme un abbé? Voix blanche, immobile, appliquée, studieuse… A trop s’écouter psalmodier, en veillant bien à ce qu’aucune émotion n’affleure de ses litanies, l’idole des Nantais « s’enfonce sous les frondaisons » (La route vers toujours)... Si Daho, ce chanteur de charme, ravive depuis trois décennies la mémoire de Jean Sablon (tiens, Etienne n’a jamais tenté la moustache!), Dominique A, qui s’accompagne sur LA FRAGILITE d’une apaisante guitare acoustique, a tout du nouveau Jacques Douai. Ses chansons propres, fossilifères, narrent des histoires plates et pastorales, de « terres brulées » où règne le « silence des campagnes», d’ « enclos ouverts à tous vents », de « pins penchés sur l’eau turquoise », de « voûtes végétales », de « chemins de roses enfouies », d’amours pâles (J’avais oublié que tu m’aimais autant) où la chair, le sang, la salive, le râle et la sueur semblent stagner dans des bocaux hermétiques. Voilà sans doute la raison pour laquelle toutes les ouailles du Marais l’écoutent à genoux, en prière. C’est un bon prêtre, le père Ané, qui compte plusieurs milliers de paroissiens.
Grand dieu... Pardon. Pardon. Pardon pour ce billet. C'est péché.

Baptiste Vignol