Beau disque


Il y a les «aigrivains» dont parlait Patrick Besson et les «chianteurs» qui s'écoutent tellement chanter de leur voix rauque et maniérée que c'en est désolant. Sur son premier album sorti en octobre 2014, Clementi interprète seul à la guitare, d'une douce voix intelligible, d'intimes chansons à la peau fine, très écrites, d'amours usés et de peines, dont l'élégance rappelle les merveilles que façonnait pour Bourvil le tandem composé par Robert Nyel et Gaby Verlor, et qui vous mettent un poison dans la tête. «Oui mais voilà, ce soir tu n’es pas là/ La fête et les rires autour de moi/ Me déchirent l’âme/ Et je t’imagine/ Seule, et cette image me mine…» (Révolutions) Rien de révolutionnaire chez Clementi, mais une trainée de tristesse, un goût d'amertume qui, grâce à la clarté de ses mélodies, soulage les cœurs vieillissants… Il suffit d'apprécier Il Tormento Dell'Estate qu'une vidéo confidentielle accompagne sur le Net pour se rendre compte à quel point toute une frange de la chanson française est abandonnée dans l'obscurité.

Baptiste Vignol