Du mensonge comme oxygène


Les labels, les attaché(e)s de presse, certains artistes et leurs "managers" (rien que le terme... À prononcer en mettant un "d" sur le "g", manadgère... Ces gens-là étant de simples secrétaires*) gonflent à qui mieux-mieux les chiffres de vente des CD. Il n'est pas rare qu'un album vendu à 30 000 unités, c'est-à-dire acheté 30 000 fois en caisse, franchisse, pour les médias, la barre des 70 000, 80 000 voire 90 000 exemplaires ! Quand on possède les vrais chiffres de ventes et qu'on souligne la supercherie destinée à faire passer tel artiste pour un champion du Top alors qu'il ne vend presque plus, les gens du métier s'indignent et vous expliquent qu'il faut savoir distinguer les "sorties caisse", "mises en place" et "quantités facturées". Cette différence avec laquelle on joue constamment n'est pas qu'à la longue fatigante, elle est nuisible au métier, donc aux artistes, tant elle jette de la confusion sur un marché qui s'évertue, on se demande bien pourquoi, à tromper le public. Comme si, dans un domaine voisin, le cinéma, on comptabilisait, pour établir le box-office, le nombre de fauteuils des salles dans lesquelles un film est projeté, en y incluant les sièges vides, plutôt que le nombre de tickets payés en caisse. Ce ne serait que mensonge. Et des films qui font des bides pourraient être considérés comme des triomphes, puisque les blockbusters, qui ne sont pas à l'abri d'un échec, sont toujours programmés, les deux ou trois premières semaines du moins, dans les plus grandes salles de l'hexagone ! Les critiques affirmeraient-ils que "Rose et Noir", "Cinéman" ou "Un homme et son chien" sont d'immenses succès populaires ?
À quand des articles de presse informant le grand public sur la carrière réelle d'un CD, comme cela se pratique paisiblement avec le cinéma ?

Baptiste Vignol

* Secrétaire : confident, personne discrète attachée à une autre pour rédiger, transcrire et expédier des lettres, des dépêches, de caractère officiel, qui s'occupe d'elle et l'assiste. (cf. Le Robert)
Pierre Onteniente, par exemple, dit Gibraltar, était l'indispensable secrétaire de Georges Brassens, lequel ne l'aurait jamais présenté en disant, dans sa moustache : "Mon manager"...