Pour Daniela Lumbroso, présentatrice officielle des Victoires de la Musique, c'était quoi, les années 70 ? Les Gondoles à Venise ? Magnolias for ever ? Qui saura ? Le France ? Vanina ? Le Zizi ? Big Bisou ?
Les années 70, Daniela, c'est aussi ça :
Les années 70, Daniela, c'est aussi ça :
AMOUR ANARCHIE (1970) de Léo Ferré. Ce double album d'anthologie (Petite, Poètes vos papiers !, La "The Nana", La mémoire et la mer...) contient Avec le temps (parue initialement en 45 tours), second triomphe populaire de Léo Ferré après C'est extra, sorti quelques mois plus tôt. Transformé par Mai 68, le free jazz et la révolution pop, l'Anarchiste est devenu une idole. À 54 ans.
HISTOIRE DE MELODY NELSON (1971) de Serge Gainsbourg. Un album concept, parce qu'il raconte une histoire, celle d'une adolescente incarnée par Jane Birkin. "-Tu t'appelles comment? -Melody. -Melody comment? -Melody Nelson." Passé inaperçu lors de sa sortie, il marquera pourtant, et d'une empreinte indélébile, la Chanson française. Sublime.
LA QUESTION (1971) de Françoise Hardy. Un album sans âge, écrit et enregistré avec la musicienne brésilienne Tuca. Françoise Hardy quittait l'autoroute des sixties, et son statut d'icône yéyé, pour des chemins plus aventureux qui feront d'elle une référence absolue.
AMOUREUSE (1972) de Véronique Sanson. Une voix unique, des compositions lumineuses pour des chansons contemporaines. Ce premier disque est en fait le point de départ d'une ahurissante série d'albums (DE L'AUTRE CÔTÉ DE MON RÊVE, 1972; LE MAUDIT, 1974; VANCOUVER, 1976; HOLLYWOOD, 1977) qui coloreront la décennie.
FERNANDE (1972) de Georges Brassens. Fernande, La ballade des gens qui sont nés quelque part, Mourir pour des idées, Quatre-vingt-quinze pour cent, Le blason, Les passantes... Faut-il en rajouter ?
À BESANÇON (1974) de Jacques Bertin. L'enfance, la naissance du désir amoureux, la solitude, les affres du vieillissement, mais aussi l'engagement politique nourrissent l'œuvre de ce franc-tireur, poète épris de jazz, respecté par ses pairs, mais parfaitement ignoré des médias. Le sommet d'une discographie exemplaire.
LES MOTS BLEUS (1975) de Christophe. Le disque ovni des années 70. Une ouverture ébouriffante (Le dernier des Bevilacqua), des tubes imparables (Senorita, Les mots bleus), des chansons émouvantes (Drôle de vie, "Pourquoi faut-il cacher ses larmes quand on vieillit ?"). Un an après son formidable come back (LES PARADIS PERDUS), Christophe s'imposait définitivement comme le plus épatant des mélodistes français.
L'HOMME À TÊTE DE CHOU (1976) de Serge Gainsbourg. Nouvel album concept et disque préféré de Gainsbourg, dit-on. À l'instar de Melody Nelson, il faudra attendre plusieurs années pour que l'histoire de Marilou soit enfin reconnue et couverte de fleurs. Hypnotique.
JAMAIS CONTENT (1977) d'Alain Souchon. Alain Souchon et Laurent Voulzy avaient déjà signé J'ai dix ans en 1974, puis Bidon en 1976. Ils ajoutent là quatre classiques à leur escarcelle : Allo Maman bobo, Poulailler's song, Y a d'la rumba dans l'air et Jamais content. Prodigieux.
LES MARQUISES (1977) de Jacques Brel. Pour certains, le dernier très grand disque de chanson française. Un album magistral, porté par un interprète à bout de force. "Veux-tu que je te dise ? / Gémir n'est pas de mise / Aux Marquises." L'année suivante, Jacques Brel serait enterré dans le petit cimetière d'Atuona, à deux pas de Gauguin.
CHAMPAGNE POUR TOUT LE MONDE (1979) de Jacques Higelin. Dantesque, déjanté, rock et grandiose. Higelin rayonne, seul dans son royaume, et balance ses plus beaux morceaux : Champagne, Cayenne c'est fini, Tête en l'air, Dans mon aéroplane blindé... Du caviar.
Baptiste Vignol