Angèle buzze


« Photo sur Insta' c’est obligé / Sinon au fond à quoi ça sert? / Si c’est même pas pour leur montrer... » En à peine huit mois (après La loi de Murphy et Je veux tes yeux), Angèle, qui n’a toujours pas sorti son premier disque, vient de balancer sa troisième bombe pop, et met la concurrence aux abois… « A quoi bon? / T'es tout seul devant ton écran / Tu penses à c'que vont penser les gens / Mais tu les laisses tous indifférents...» Magistral. Combien de chanteurs qui s’étalent sur «Insta'», s’inventent des looks de gonz loufoque alors qu’ils sont presque quinquas, s'autocitent en exemple, se présentent en anglais (l’impayable « songwriter » qu’on voit fleurir ici et là – t’écris des chansonnettes mec, c’est déjà ça, laisse le songwriting à Macca et Elliott Smith) ou bien publient leurs dessins à la con sous des averses de like en toc, se dandineront cet été, un verre de spritz à la main, sur cette nouvelle perle d’Angèle, aussi juteuse qu’une pêche blanche? Si La Thune et son clip tapent dans le mille, c’est parce que cette chanson sucrée regorge d’humour, de finesse et d’autocritique : «Au fond j’avoue que même moi / Je fais partie de ces gens-là / Rassurée quand les gens ils m’aiment… » Imparable. « Pourquoi Instagram rend triste? » demandait récemment le site Clique TV à deux médecins spécialistes des réseaux sociaux. « Je vais essayer de faire simple…, répond l’un d’eux. À chaque fois qu’on mange du chocolat, qu’on fait l’amour ou qu’on regarde un bon film, le cerveau sécrète de la dopamine (l’hormone du bonheur) qui provoque une sensation de bien-être. C’est la même chose avec Instagram. Le cerveau est programmé pour rechercher le plaisir, sauf que là, il se fait avoir. Le cerveau croit voir des choses qui lui font du bien, alors que ce qu’il voit ne le nourrit pas. Ce manque crée le sentiment de déprime. C’est comme une descente de drogue, un peu. » Cette plate-forme de l’autosatisfaction permanente qui vient d’atteindre le milliard d’utilisateurs aura tout de même inspiré à la plus désirable des jeunes chanteuses francophones une espièglerie pétillante dont la seule nocivité, au fond, sera de rendre ses fans définitivement accrocs. Un million de clics en trois jours.

Baptiste Vignol