L'art du retour de service


Hier 28 septembre, l’on proposait en exclu sur Inter la nouvelle chanson, le nouveau morceau, la nouvelle œuvre d’un poète inusable: MC Solaar. Quel bol d’air. Et quel ravissement. La rime est de retour, parfaite, carrée, pointue, pleine d’humour, de fiel et de sagacité. Après le très prometteur Sonotone, dont le clip chauffe sur la Toile, Géopoétique rend baba. Et démontre à quel point il y avait, il y a et sans doute y aura-t-il pour des siècles encore Solaar et les autres. Parmi les grands come-back, le natif de Dakar, avec son huitième album, dont la sortie est programmée début novembre, semble s’inscrire, après une décennie d’absence, dans une lignée miraculeuse, celle des cracks, des pur-sangs, des as de l’esquive et du crochet foudroyant. Car la légèreté de Solaar possède l’irrésistible impact qu’affichait encore, en 1986, Ray Sugar Leonard après quelques années de retraite, quand ses «semblables», anciens ou récents, avancent le pas lourd, et l'air renfrogné, tel Marvin Hagler. Toute la différence.

Baptiste Vignol

Une nostalgie plaquée or


Gros papier cette semaine dans Match (n°3565) consacré à la tournée triomphale de l'orchestre Les Insus qui vient de se conclure au Stade de France. Son auteur, Benjamin Locoge, juge la chose d’un œil lucide, titrant son enquête: « Un retour payant ». Le show business étant l'industrie du mensonge, Locoge dépeint froidement le jackpot orchestré par trois ex-Téléphone (Aubert, Bertignac et Kolinka) et leur manager de l'époque (Ravard), qui ont exclu de leur retour, avec l’élégance dont sont parfois capables les hommes, Corine Marienneau, quatrième pilier du plus grand groupe de rock français. Pour expliquer son absence, Bertignac, pas honteux pour un sou, a mainte fois raconté qu’il n’a pas croisée la bassiste «depuis trente ans», oubliant, ce doit être l’âge, avoir réalisé et composé l’essentiel de son album solo, CORINE, en 2002… Locoge revient aussi sur les manières de Ravard, les déplacements en jet privé, les loges à part et surprotégées dans les festivals, les fureurs d’Aubert, les caprices de stars et l’amitié qui n’est plus: « les guerres d’antan sont sur le point de resurgir… », « en privé, Bertignac confie volontiers être toujours surpris par le côté petit chef d’Aubert »… Amassant au minimum 300 000 euros par concert (il y en a eu 81 entre avril 2016 et septembre 2017), les trois musiciens et leur manager auraient, selon un proche, « désormais de quoi faire vivre plusieurs générations. Pour Richard Kolinka et pour François Ravard, c’est inespéré. » Le disque live de leur tournée vient tout juste de sortir. S’écoulant à seulement 25.000 exemplaires la première semaine, il s’est fait écrabouiller par le retour d’Indochine dont le treizième album studio, commercialisé en même temps que celui de leurs anciens concurrents, s’est vendu à 75.000 unités. Téléphone est mort pour toujours, assassiné de l’intérieur.

Baptiste Vignol

Idolâtrie

Ceci n'est pas une pipe!


Pour les Inrocks, chaque nouvel album de sa majesté est «une pierre majeure dans l'histoire de la chanson d'ici». C'est drôle. D'autant plus que CC, l'idolâtre aux salamalecs, sort en novembre chez Flammarion sa deuxième biographie de l'idole. Une mécanique bien huilée. Et ça fait des grands flchss, comme chantait Brel dans Ces gens-là.

Baptiste Vignol