Quand Murat se souvient...


Sa foisonnante (et passionnante) discographie contient une quinzaine de chefs-d’œuvre. C’est énorme, c’est très rare un chanteur qui compte quinze chansons bouleversantes, parfaitement inusables. Ils ne se bousculent pas sur la liste, ces crack-là. Voyons un peu. L’Ange déchu, Le Troupeau (CHEYENNE AUTUMN), Le Lien défaitSentiment nouveau (LE MANTEAU DE PLUIE), Le Berger de Chamablanc, Terres de France (EN PLEIN AIR), Le Monde caressant (VENUS), Dieu n’a pas trouvé mieux, Aimer (DOLORES), Nu dans la crevasse, Au mont-Soucis (MUSTANGO), Plus vu de femmes (PARFUM D'ACACIA AU JARDIN), La Maladie d’amour, Le Voleur de Rhubarbe (LILITH)… Autant d'immarcescibles fleurs des champs. Mais depuis La Tige d'or en 2009 sur LE COURS ORDINAIRE DES CHOSES, Murat fauchait, labourait, semait. IL FRANCESE est son dix-huitième album-studio. Celui d’un retour divin, par la seule grâce d’une complainte importante, imparable, éternelle, déchirante où Murat chante comme on ne l’avait quasiment jamais entendu: Je me souviens. Se souvenir que Murat, avec sa belle gueule d’amant idéal, est un seigneur, qu’il sève encore (du verbe sever), qu'il n'est pas dans la nostalgie facile et que sa voix demeure, et de loin, la plus sensuelle que la chanson française n’ait jamais enfantée.

Baptiste Vignol