Ça, c'est du music-hall



Bien sûr il y a le spectacle qui cartonne et séduit la critique de tout poil, sa mise en scène ingénieuse et variée, ses décors novateurs, son orchestre rock dans des airs venteux; ses héros légendaires, ça va de soi, Julien Sorel, Mme de Rênal..., interprétés par des comédiens chanteurs séduisants (parmi lesquels il faut citer l'excellent Patrice Maktav dans le rôle de l'ignoble Valenod), l'intemporalité de l'intrigue évidemment (l'évolution sociale d'un jeune homme pauvre mais ambitieux), la qualité du livret également, des parties parlées et le souffle du répertoire proposé. Bien sûr. Mais il y a aussi le disque qui permet au spectateur qui n'a pas lu Stendhal d'arriver au Palace en territoire connu et d'en repartir conquis, les chansons plantées dans la tête. Leur richesse tient au regard moderne des auteurs sur une histoire d'amours secrètes dont l'action se déroule sous la Restauration, que des musiques calibrées certes, mais jouées avec brio, enrobent parfois d'envolées ambitieuses. L'ensemble donnant, quand Paris allume ses lumières, un «musical» haut de gamme, familial et soigné dont l'atout phare est d'avoir été conçu – ça se voit, ça s'entend – par une équipe d'experts (le producteur Albert Cohen, le directeur artistique Vincent Baguian, le metteur en scène François Chouquet) qui tient en estime le public. Assez pour que ce dernier, en quittant le théâtre, manifeste l'envie de se (re)plonger dans le roman ? Cela ne fait aucun doute.

Baptiste Vignol