Écris-moi un single


Rien n'est plus incertain que de prédire le tube, selon l’argot des musiciens, pour désigner une chanson vouée au succès. Dans le milieu, les directeurs artistiques, qui manquent, pour les plus caricaturaux, de nez et d'oreilles, l'appellent aujourd'hui un single. Ils harcèlent "leurs" artistes en leur répétant "on n'a pas le tube", "écris-moi un single"... "up tempo" précisent-ils pour dire "au rythme rapide". Comme si "leurs" chanteurs pouvaient accoucher d'un single aussi naturellement qu'une poule pond des œufs! N'est pas Jean-Jacques Goldman qui veut. Parfois, ils s'enthousiasment, tel un Valery Zeitoun, et s'exclament en fins connaisseurs: "Wouah, c'est un pur single, juste un gros tchube!" et ça ne casse au final pas trois cacahuètes...
L'écho d'une chanson est parfaitement imprévisible. Sans quoi L'orage, Quoi ma gueule, Mes emmerdes, La nuit je mens, Avec le temps, Ma môme, Allo maman bobo, Une île, Petite Marie, La javanaise, Ne me quitte pas, La folle complainte ou Melody Nelson auraient connu, dès leur sortie, les sommets des hit-parades. Ces chansons-là, à force d’être chantées, reprises, redécouvertes et applaudies, sont devenues des standards du répertoire francophone. A contrario Les mots bleus, Le Sud, Mistral gagnant, Comme d'habitude, Un homme heureux, Jardin d'hiver ou J'ai demandé à la lune (que des chansons lentes, soit dit en passant) ne semblaient pas prédestinées à devenir illico des incontournables... Rien n'est moins sûr que le succès d'une chanson.
Aujourd'hui un jeune chanteur dénommé Ludéal sort son deuxième disque, ALLEZ L'AMOUR. La chanson-titre, aussi légère qu'une paire de babouches, aurait tout du hit en puissance, sans parler du clip qui l'accompagne, malin, simple et guilleret. Qui décidera du triomphe? Le public, si les radios jouent le jeu.

Baptiste Vignol

Allez l'amour, le clip