Étrange, aux antipodes, que de tomber en direct, à minuit passé, en rentrant d’un barbecue sous le ciel étoilé d'Auckland, sur les obsèques de Johnny Hallyday… Colossales. Démesurées. Impossible alors de ne pas rester scotché sur l'écran de l'ordinateur. Même quand on fait partie de ceux qui n’ont jamais été complètement touchés, emballés, transportés par cette infatigable idole que ses admirateurs appelleront toujours le Taulier. Mais cette France qui chante, d’une voix juste, devant un cercueil blanc… Pourquoi nier l'authentique qualité de certaines chansons de son répertoire (allez, Retiens la nuit, Que je t’aime, J’ai oublié de vivre, Elle m’oublie, Le chanteur abandonné, L’Envie, Mirador parmi d'autres, portées par d'infaillibles mélodies…), le charisme du personnage, la beauté de sa voix, sa puissance et sa rage? Comment échapper au charme ravageur de son sourire? À la pureté presqu’enfantine de son regard? Pourtant, aussi bizarre que cela puisse paraitre, cet alliage de biker divin ne garantissait pas à coup sûr l’émotion. Celle-là qui fait souffler le vent sous la peau. Voilà pourquoi, sans doute, l’œuvre et la mort de Johnny Hallyday auront laissé quelques cœurs de pierre sur le bas-côté… Mais cette foule qui chante, et pleure, par un pâle samedi de décembre, du plus profond de son cœur. Ces funérailles hallucinantes. Ce pays qui s’arrête. Et la dignité bouleversante de Laura Smet et David Hallyday, debout, main dans la main, attendant leur père, devant l'église de la Madeleine, face à des millions de Français. Sang pour sang.
Baptiste Vignol