Comment les chansons naissent-elles dans la tête de leurs auteurs? Marcel Amont avait publié au Seuil, en 1994, un bel essai sur la question: Une chanson, qu'y a-t-il à l'intérieur d'une chanson ? Tous les sujets peuvent être abordés, même les plus inchantables, ou les moins convenables, les circonstances du moment constituant un terreau fort usité par les meilleurs chansonniers. Là où un Michel Sardou passerait en force, ne faisant pas dans la dentelle, mais allant vite à l'essentiel, car l'essentiel, c'est l'audience (Le France, Les Ricains, Je suis pour, etc.), Alain Souchon, lui, miserait plutôt sur la finesse, la sensibilité de son public, évitant coûte que coûte le cliché, ce qui n'est pas gage d'insuccès (Poulailler's song, Foule sentimentale, C'est déjà ça). Question de tempérament. Plus "souchonnante" que "sardonique", Jeanne Cherhal a consacré l'une de ses récentes compositions au thème de la garde à vue. On ne l'attendait pas spécialement sur ce terrain-là. Comment lui est venue l'idée ? En écoutant, paraît-il, un témoignage diffusé dans l'émission de Daniel Mermet, Là-bas si j'y suis sur France Inter. "Je vis dans un pays d'amour/ Tous les matins au petit jour/ Le service d'ordre est renforcé..." constate-t-elle sur un air entêtant. Cette chanson, Pays d'amour, se trouve aujourd'hui plus que jamais dans les phares de l'actualité, la garde à vue ayant été mise à l'index, fin juillet 2010, par le Conseil constitutionnel. Qui a dit que les chanteurs populaires sentaient souvent le vent tourner?