Quand Paris Match cause chanson, on trouve souvent des informations curieuses, des points qui mériteraient d'être éclaircis mais qui restent lettres mortes et les rendent donc inutiles. Dans l'article «Les Chedid ainsi soient-ils» [n°3448, du 18 au 24 juin 2015] qui propose un long entretien avec Louis, Mathieu, Anna et Joseph à l'occasion de leur tournée familiale, le père assure: «Je déteste la chanson engagée.» C'est tout à fait son droit, mais cela ne manque pas d'étonner quand on se souvient qu'il a lui-même chanté Le chacha de l'insécurité en 1983, Anne ma sœur Anne en 1984, Le gros blond en 1988, Zap-Zap en 1989 puis Reality show deux ans plus tard sur le même sujet, Bleu blanc rouge et N'oublie pas la capote en 1992, Si Madame nature a les nerfs en 2003… De bonnes chansons bien «engagées», au sens sartrien du terme, qui se chantent au service d'une cause ou qui prennent position sur les problèmes de leur temps sans toutefois faire oublier l'amour des mots et de la musique. Puis Louis ajoute: «Je ne parle pas de Renaud, qu'on soit bien d'accord, mais de gens qu'on a oubliés pour la plupart.» Bizarre, cette précision, alors que nul n'évoquait Renaud. Serait-il devenu impossible aujourd'hui de laisser penser qu'on puisse ne point aimer Renaud? Ou bien serait-ce que l'œuvre de Renaud se limite pour Louis Chedid à ses chansons engagées, ou «militantes», autrement dit qui combattent et qui luttent? Celles qui resteront, Mistral gagnant, Ma gonzesse, En cloque, La pêche à la ligne, Chanson pour Pierrot, Morgane de toi ne sont que chansons d'amour. Dans cet entretien «mené» par Benjamin Locoge, le spécialiste des variétés du magazine, Chedid clôt ainsi sa pensée: «Les chansons militantes, Léo Ferré mis à part, sont très chiantes.» Il y en a pourtant de ratées chez Ferré, tout intouchable qu'il soit. Militantes, engagées… On aurait aimé en savoir davantage sur ce que Louis Chedid entend par ces gros mots. Mais bon, Benjamin Locoge.